Organisations Positives
COMPRENDRE LE RENOUVEAU DES FORMES D’ENGAGEMENT AU TRAVAIL.
Eric Mellet et Philippe Pierre
Quatre billets pour comprendre et agir !
Avec Philippe Pierre, nos actions de formation et de coaching ainsi que nos partages d'expérience réguliers, nous ont révélé à quel point la question de la place réelle du travail pour jeunes et moins jeunes était au coeur des préoccupations de nos clients. Que pointaient sans cesse de fortes interrogations sur une quête de sens au travail, une supposée baisse tendancielle de motivation, et plus largement, un renouveau des formes d’engagement dans la sphère du travail.
Photo de Etienne Girardet sur Unsplash
Nous serions à un moment charnière, à un tournant franchi. De 10,3 % de taux de chômage en 2015, au sens du BIT, nous sommes passés à 7,3 % de la population active fin 2022. En moyenne, une offre d’emploi attire désormais moins d’un candidat alors qu’ils étaient 2,60 à se manifester en 2021. Ces chiffres varient du simple au triple selon les secteurs. La branche de la santé attire, par exemple, une moyenne d’à peine 0,4 candidat par offre ! Plus de 4000 postes de professeurs étaient restés non pourvus en juillet 2022. Manquera-t-on, à nouveau, de candidates et candidats à la rentrée 2023 ?
La « désertion » vient toucher des professions cruciales pour le simple fonctionnement quotidien de notre société.
Alors que le travail a, pour la plupart d'entre nous, constitué le socle, voire le sens majeur de l'existence, il semble ne pas en être de même pour des personnes qui ont envie d’avoir plusieurs vies professionnelles à vivre en même temps ou de « sortir du système ».
Aussi, c'est à travers quatre billets que nous nous proposons de tenter un décryptage des dynamiques à l'œuvre et que nous conclurons par la force de la différence, chère à Norbert Alter, de celles et ceux que nous nommons « déviantes et déviants positifs ».
Pour cela, nous croiserons regards et expériences issus de nos formations, nos conférences, nos enseignements universitaires ou nos coachings et de quatre champs disciplinaires :
• Sociologie de l’entreprise
• Management Interculturel
• Psychologie Positive
• Organisation Apprenante ...
et de trois niveaux d'observation…
• La société globale
• Les cultures d’organisation
• La vie en équipe avec des « déviants positifs »
Dans nos quatre billets, vous trouverez, et nous assumons ce choix, considérations sociologiques et conseils pratiques de management. Si le seul outil dont nous disposons est un marteau, tout autour de nous ressemblera à un clou !
Nous chercherons à déconstruire des idées-reçues telles que « les Français seraient paresseux, et bien plus que les Allemands ou les Scandinaves… », que la « Grande Démission » serait synonyme de « Grande Paresse », que la paresse c’est l’inaction et le repli sur soi, que les jeunes ne voudraient plus travailler et sont plus individualistes que leurs ainés, que la crise sanitaire aurait finalement inauguré, en trois années, un rapport inédit au travail....
Au-delà des discours définitifs ou tonitruants, une révolte plus silencieuse se propage et qui renvoie au type de société que nous voulons construire demain. Et si les symptômes d’une rupture de la jeunesse avec le « sens du travail » dissimulaient, en réalité, la forêt du doute et même de la résignation face à un certain avenir que l’on ne veut plus ? Les Stakhanov se transforment-ils en Oblomov, ce personnage du roman éponyme d'Ivan Gontcharov affecté par une indécrottable apathie et la tentation du divan ?
Dans un premier billet (Crise de l’engagement et « Grande Démission » dans une société en « archipel »), nous interrogeons la notion même de « Grande Démission », cherchons ses sources et en relativisons la portée.
Dans un deuxième billet (Vivons-nous réellement la fin de la centralité du travail dans nos vies et pourquoi ce "Grand Bouleversement" ?), nous explorons une demande généralisée d’aplatissement des structures hiérarchiques et, plus largement, une érosion des figures traditionnelles d’autorité.
Dans un troisième billet (Grande Flemme ou renouveau de l’engagement ?), nous mettons en doute certains effets de la technologie galopante sur le bien-être et soulignons une face plus sombre de la société de confort.
Dans un quatrième billet (La place des "Déviants Positifs"), nous en appelons à la force des atypiques et mettons en garde contre le « Grand Adéquationnisme» qui toujours célèbre mimétisme et entre-soi et ce, dès le recrutement. Nous valorisons la force de la rencontre et des atypiques si ceux-ci sont généreux et délivrent du résultat au-delà de leurs seules différences.
Nous sommes questionnés par David Lambert dirigeant de FuturGo, un cabinet conseil innovant dont les équipes sont convaincus que placer ensemble l'innovation au service des entreprises confère un avenir plus sûr et qu’il convient de fonder un nouveau pacte de loyauté et d’engagement entre employeurs et employés.Billet 3/4 : « Grande Flemme » ou renouveau de l’engagement ?
BILLET 4/4 : ET SI L'ON ESSAYAIT LA "DÉVIANCE POSITIVE" ?
7 points en résumé :
Dans ce billet accessible sur www.mellet-consulting.com et sur www.philippepierre.com, derrière le terme de « déviants positifs », nous pointons plusieurs phénomènes :
- Associons « pépites extérieures » et « pépinières internes » ! On ne peut plus recruter que des experts avec 5 à 10 ans d’expérience dans un métier et cela oblige à élargir constamment viviers et manières de regarder les autres pour mieux les connaître et les intégrer !
- A une approche « problème cherche solution », préférons le regard des « déviants positifs » qui nous permettent d’échapper aux solutions standardisées et aux carrières longues en « escalier »
- Ces « déviants positifs » ou « talents » sont utiles pour innover et faire rupture quand cela est utile. Selon nous, ils illustrent l’usage de la liberté, de sa liberté, comme pouvoir de révision des normes qui prévalent dans un collectif humain et disent souvent une « normalité » qui engourdit
- Ces « déviants positifs » ou « talents* » sont souvent mis à mal par des personnes qui les transforment en « boucs-émissaires »
- Les innovateurs s’étiolent assez vite dans une organisation classique qui ne cultive pas un ou des « environnements apprenants ». Et aussi l’éducation de l’audace qui n’est pas sanction de l’échec mais expérimentation et encouragement constant à « l’essai-erreur »
- « Déviants positifs » et « talents » ont cela aussi en commun de vouloir « apprendre à apprendre » et d’apprécier les managers qui - leur fixant un cap et un cadre - osent le feed-back très régulier
- Rénover une culture d’organisation - en intégrant des profils atypiques - est certes long et exigeant mais ne peut se faire sans souci de l’équité. C’est-à-dire, savoir identifier et assumer des différences, produites précisément par les déviants « positifs » et « talents », qui profitent, au final, à toutes et tous !
Vous croiserez, dans ce billet, Marlon Brando et l’équipée sauvage, les principes de la « déviance positive », des équilibristes de l’émergence, Jacques Dutronc, un énergigramme, des pas sur le bitume, René Girard, Françoise Héritier, Colette, un lama qui vous regardera avec amour, Nietzsche en toute fin du billet…
*Vous l'avez compris, notre définition du "talent" n'est pas celle qui prévaut dans beaucoup d'organisation pour lesquelles le "talent" a les caractéristiques du dirigeant actuel avec 20 ans de moins !
A la recherche du déviant positif @jeremy-bishop - Surfer
David Lambert (Dirigeant de FuturGo) : Eric Mellet et Philippe Pierre, en quoi consiste l’approche de la « Déviance Positive » ?
De manière tout à fait conventionnelle, les praticiens accompagnateurs du changement social se concentrent sur les comportements les plus communs dans les organisations qui rencontrent des difficultés pour en comprendre les origines et y apporter des « solutions correctives[1]. C’est l’approche classique : « problème cherche solution » !
Force est de constater que trop souvent devant des défis toujours plus complexes, les méthodes dites « traditionnelles » d’accompagnement du changement fondées sur les outils et pratiques des « experts externes » ne marchent plus, voire même suscitent le rejet. C'est même selon une étude McKinsey (c'est quand même un comble), 70% de taux d'échec des missions de la sacro-sainte "conduite du changement"[2]. Une raison majeure : la sous-estimation du "facteur humain"! Les acteurs du système vivent cela comme une disqualification de leurs compétences, une défiance des dirigeants à leur égard et cela sape leur engagement. Le syndrome de la « Best Practice » identifiée à la serpe par l’expert extérieur inconscient de la complexité du système, formalisée en fiche prête à l’emploi et imposée par une hiérarchie loin du terrain ne trompe plus personne !
L’approche dite de la « Déviance Positive » s’appuie sur l’idée que :
• toute communauté est à même d’identifier ses difficultés si on lui en donne l’opportunité, le temps et les moyens
• dans toute communauté, des « déviants positifs » ont déjà trouvé des solutions adaptées à la situation/problème et à ses contraintes
• une fois identifiées, ces pratiques peuvent être transmises (sans être imposées) et donner lieu à des plans d’action concrets pour promouvoir leur adoption par toutes les parties prenantes concernées
• les réussites doivent être communiquées, célébrées et amplifiées stimulant ainsi « l’apprenance » à tous les niveaux de l’organisation
Parce qu’iIs agissent le plus souvent dans les interstices de l'organisation, à sa périphérie, là où la prise d'initiative est possible et en fonction de l'opportunité qui se présente, les « déviants positifs » ont besoin de ressentir de la confiance de la part de leur hiérarchie, d’éprouver la reconnaissance de leur contribution spécifique et de bénéficier de l’autonomie pour s'exprimer et innover.
Lire l'article complet :
https://mellet-consulting.com/et-si-lon-essayait-la-deviance-positive/
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